Tribune de Denis Vallance, président de l’UNAFORIS
Notre société mondiale est secouée de toutes parts par cette pandémie sans précédent.
Les repères solides d’hier deviennent doutes. Les économies vacillent. Partout, la vague de contagion provoque angoisses, peurs du lendemain, méfiance de l’autre.
Et pourtant, dans cette houle inédite, des fondamentaux encore plus historiques refont surface. Solidarité, fraternité, entraide, échanges, veille et attention aux plus fragiles… Chaque citoyen en devient un artisan possible.
Le meilleur rempart à la dérive devient l’innombrable addition des individus qui sauront se relier pour ne pas être emportés. Là où on pensait que le socle économique ferait roc, le sable qu’on découvre en-dessous n’a pour résistance que la mosaïque des bras qui se tendent, des solidarités qui se nouent.
L’engagement volontaire et citoyen de chaque maillon de cette solidarité humaine planétaire devient la condition de la réussite, alors qu’il n’était, il y a peu encore, que force et compétence individuelle au service de l’objectif supérieur de l’économie et de la croissance.
On ne dira jamais assez de l’illustration admirable de cet engagement dans le domaine de la santé. Ces professionnels qui s’engagent quotidiennement pour sauver des vies et mettre leur temps et leurs compétences au service de la survie de chacun et de celle de la société.
D’autres colibris apportent chaque jour leur contribution à l’indispensable chaîne de la solidarité. Tous les travailleurs sociaux qui apportent discrètement mais efficacement leur compétence, malgré les risques tout aussi grands auxquels ils font face, au domicile des personnes isolées, dans les Ehpad, dans les foyers de l’enfance, dans les maisons pour personnes en situation de handicap, dans les centres d’accueil de migrants ou de publics exclus déjà de longue date de la société…
Assistants sociaux, éducateurs spécialisés, conseillers en économie sociale et familiale, éducateurs de jeunes enfants, auxiliaires de vie, intervenants à domicile, et bien d’autres métiers au service du lien social, il nous faut rendre hommage à ces métiers du travail social. Ils ont été trop longtemps confinés au rôle de réparateurs des maux de ceux que le train de la croissance laissait pour compte.
Ils montrent aujourd’hui, comme le Conseil National de la Résistance l’avait brillamment anticipé, qu’on ne reconstruit pas une société après de telles secousses, sans faire que chacune, chacun de ses citoyens se sente en dignité, en sécurité, et relié aux autres.
A côté de tous les travailleurs sociaux qui œuvrent inlassablement à cette noble mais difficile tâche, des dizaines de milliers de jeunes s’engagent chaque année dans des cursus de formation qui les conduiront, parfois par défaut, souvent par vocation, mais toujours grâce à leurs formateurs bienveillants et compétents, ainsi qu’à l’ensemble des salariés des centres de formation, à devenir à leur tour l’un de ces discrets colibris. Les innombrables gouttes de solidarité qu’ils véhiculent dans tous les territoires, aident la solidarité nationale à se concrétiser. Depuis début mars, nombre d’entre eux se sont engagés solidairement auprès des professionnels, pour leur prêter main forte.
Au-delà des cohortes innombrables de ceux qui en ont fait leur métier, et de ceux qui s’y préparent, ce sont tous les intervenants sociaux, quels que soient leur rôle, leur fonction, leur statut, qui viennent consolider la solidarité indispensable à la survie de la Nation.
Ici un pair-aidant un membre fragilisé de la famille. Là une association d’accueil de migrants ou de sans-abris. Ici encore une association de secours alimentaire, d’hébergement ou de service à domicile, d’appui aux gens du voyage, de jardins partagés, d’économie sociale et solidaire, d’éducation populaire…
Tous, d’abord citoyens, constituent l’immense armée de ceux qui, mieux que toute utopie sur la redistribution naturelle d’une économie chancelante, constituent les fondations réelles, tangibles, territorialisées et non délocalisables, d’une société qui remettra demain au centre de ses préoccupations le bien-vivre pour tous.
La Nation se grandira en leur faisant confiance pour construire, chacun à sa place avec une dignité retrouvée, le monde dont ils rêvent plutôt que de subir le monde que d’autres ont rêvé.
Merci, merci mille fois à tous ces colibris qui sauront, par leur addition solidaire, éteindre le vertige d’un embrasement qui aura révélé certes beaucoup de failles, mais tellement plus d’atouts pour reconstruire demain !
Soyez fiers d’être travailleurs sociaux, étudiants et stagiaires, intervenants sociaux professionnels ou bénévoles : la planète compte sur vous et en a bien besoin !
Denis Vallance